Démographie Infirmière en France : Chiffres Clés et Enjeux de la Profession
Estimation du temps de lecture : 5 min La profession infirmière en France connaît des évolutions marquées ces dernières […]
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Paru en avril 2025, l’Atlas de la démographie médicale du Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM) s’accompagne cette année d’une alerte inhabituelle qui détonne : la France pourrait connaître une surpopulation médicale à l’horizon 2040 !
Face à cette projection, une question s’impose : fantasme d’un retour à une logique de restriction planifiée de l’offre médicale ou réalité territoriale et spécialiste ?
Au 1er janvier 2025, 241 255 médecins étaient recensés en France, en hausse de 1,7 % sur un an, soit près de 12 % de plus qu’en 2010. Selon les projections du Cnom, cette croissance annuelle de 2 % pourrait se maintenir, portant les effectifs à plus de 315 000 professionnels en 2040. Une progression tirée notamment par l’assouplissement du numerus clausus, devenu numerus apertus, et la montée en puissance du cumul emploi-retraite.
Le numerus apertus est un dispositif mis en place en France à la suite de la suppression progressive du numerus clausus par la loi du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé.
Contrairement au numerus clausus, qui fixait un nombre strict d’étudiants autorisés à passer en deuxième année de médecine à l’échelle nationale, le numerus apertus repose sur une logique plus souple et territorialisée. Il permet aux universités de fixer, chaque année, le nombre d’étudiants admis en deuxième année sur la base :
Dans la pratique, le numerus apertus reste fortement encadré : les universités fixent un seuil d’admission, mais ce seuil ne peut pas être inférieur à un plancher fixé par arrêté ministériel. |
Mais cette hausse n’est pas uniforme : elle est surtout portée par les générations plus jeunes, plus féminines, et par les praticiens diplômés à l’étranger, de plus en plus nombreux dans les déserts médicaux.
L’analyse par spécialité révèle des décalages importants : certaines disciplines comme la médecine d’urgence, la psychiatrie ou la pédiatrie connaissent un déséquilibre fort entre jeunes entrants et départs massifs prévus. D’autres, comme la radiologie ou la chirurgie orthopédique, affichent une relative stabilité.
Géographiquement, les zones rurales et les quartiers urbains défavorisés dépendent fortement des médecins à diplôme étranger (jusqu’à 20 % des effectifs dans certaines spécialités). Cette médicalisation périphérique est une réalité contrastant avec les craintes de « trop de médecins » exprimées au niveau national.
En parallèle de cette publication, l’Assemblée nationale examine une proposition de loi visant à encadrer la liberté d’installation des médecins. Portée par plusieurs députés, ce texte propose un système d’autorisation préalable à l’installation, sur le modèle des officines pharmaceutiques.
Cette mesure vise à corriger les fractures territoriales pointées par la DREES et reprises dans l’exposé des motifs :
Mais cette proposition entre en résonance directe avec l’alerte du CNOM : si l’on contraint les installations pour rééquilibrer le territoire, cela pourrait justement atténuer le risque de surpopulation dans les zones denses. En revanche, si les flux de praticiens restent libres et s’agglomèrent dans les mêmes territoires et les mêmes disciplines, l’effet « salle d’attente vide » dans certaines zones pourrait devenir une réalité.
La réflexion du CNOM souligne l’urgence de sortir d’une logique purement numérique. Augmenter le nombre de médecins sans modération territoriale ou spécialisée risque de reproduire les erreurs du passé. L’offre doit être ajustée non seulement à la population, mais aussi à son vieillissement, à la progression des maladies chroniques, à l’évolution des modes de vie et aux innovations en santé (téléconsultation, travail aidé, etc.).
L’équation n’est donc pas simple. Faut-il réduire la formation ? Pas nécessairement, mais l’adapter. Faut-il contraindre les installations ? Peut-être, mais en concertation avec les territoires et les ordres. Faut-il mieux intégrer les médecins à diplôme étranger ? Certainement, en leur assurant un accompagnement et une reconnaissance rapide.
En Bourgogne-Franche-Comté, la densité en médecine générale reste inférieure à la moyenne nationale, avec seulement 9,1 médecins généralistes pour 10 000 habitants contre 11,3 au niveau national. Près de 43 % des médecins généralistes de la région ont plus de 60 ans, tandis que les moins de 40 ans ne représentent que 17 % des effectifs, selon l’Atlas du CNOM. Ce vieillissement marqué laisse présager des difficultés croissantes d’accès aux soins dans les années à venir, en particulier dans les territoires ruraux comme la Nièvre ou la Haute-Saône.
En Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA), certaines spécialités sont nettement surreprésentées, notamment la dermatologie (avec une densité de 3,2 pour 10 000 habitants contre 2,5 au niveau national) et l’ophtalmologie (3,8 contre 3,0). Mais cette concentration se situe surtout dans les grandes agglomérations comme Marseille, Nice ou Toulon. En revanche, les zones périurbaines et les arrière-pays, notamment les Alpes-de-Haute-Provence et le Haut-Var, souffrent d’un déficit de renouvellement : moins de 20 % des spécialistes y ont moins de 40 ans. Cette situation accentue les inégalités d’accès aux soins spécialisés et confirme la nécessité d’une régulation territorialisée de l’offre médicale.
Dans les Hauts-de-France, la présence des praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue) est devenue un pilier de l’offre de soins dans plusieurs spécialités critiques. En psychiatrie, ils représentent jusqu’à 24 % des effectifs, et en pédiatrie, près de 18 %, comblant des postes vacants dans les établissements publics et les structures de premier recours. Leur répartition reste toutefois inégalement répartie, avec une forte concentration dans les départements de l’Aisne et du Pas-de-Calais.
En Auvergne-Rhône-Alpes, le dynamisme des installations en médecine générale, particulièrement en périphérie des grandes villes comme Lyon ou Grenoble, donne une impression globale de renouvellement. Pourtant, des disparités marquées subsistent : l’Ardèche, par exemple, affiche un taux de médecins généralistes de 8,1 pour 10 000 habitants, bien en dessous de la moyenne régionale (10,7) et nationale (11,3). En Haute-Loire, 39 % des généralistes en activité ont plus de 60 ans, et seuls 16 % ont moins de 40 ans, rendant le renouvellement démographique incertain. Ces déséquilibres mettent en lumière les limites d’une analyse agrégée et renforcent l’intérêt d’une approche territorialisée de la démographie médicale.
L’alerte du CNOM est moins un signal de « trop de médecins » qu’un appel à une stratégie intelligente. Il ne s’agit pas de reproduire les politiques restrictives des années 1980, mais de définir des besoins médicaux à l’échelle des bassins de vie, en tenant compte des spécificités territoriales et épidémiologiques.
Ce fantasme du trop-plein, alimenté par une lecture agrégée des chiffres, peut masquer le réel enjeu : une médicalisation à deux vitesses, où l’on verrait coexister déserts et zones denses, disciplines en tension et secteurs saturés.
Le CNOM appelle ainsi à l’élaboration d’une méthodologie robuste, impliquant les élus locaux, les universités, les ARS et les professionnels de santé. Le débat parlementaire en cours sur la régulation des installations médicales pourrait en être le premier jalon structurant.
Le système de santé français entre dans une nouvelle ère où l’abondance apparente pourrait devenir un problème si elle n’est ni orientée ni encadrée. Le numérus clausus, autrefois accusé de tous les maux, a laissé place à une ouverture massive. Il est temps de se demander non pas combien de médecins nous formons, mais où, comment, et pour qui.
Saurons nous sortir d’une logique comptable pour passer à une logique des besoins des bassins de population ? C’est sans doute ici que se joue la crédibilité de la planification sanitaire : dans sa capacité à anticiper sans freiner, à orienter sans contraindre aveuglément, à rendre le territoire médicalement solidaire, sans reproduire les erreurs du passé.
Sources :
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