<

Accès direct aux soins kinésithérapiques : une expérimentation pleine de promesse

Accès direct aux kinéthérapeutes

Estimation du temps de lecture : 6 min

 

Le vendredi 28 juin 2024, un décret publié au Journal Officiel a marqué une étape importante pour la profession des masseurs-kinésithérapeutes en France. Ce décret met en place une expérimentation de cinq ans, permettant l’accès direct des patients à ces professionnels de santé, sans besoin de prescription médicale, dans le cadre de Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS).

Ce Décret n° 2024-618 du 27 juin 2024 relatif à l’expérimentation permettant aux masseurs-kinésithérapeutes participant à une communauté professionnelle territoriale de santé d’exercer leur art sans prescription médicale s’inscrit dans le cadre de la Loi dite « Rist » n° 2023-379 du 19 mai 2023, portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé.

En simplifiant et en facilitant l’accès aux soins kinésithérapiques, les délais d’attente et la surcharge des consultations médicales pour des pathologies nécessitant une rééducation fonctionnelle sont réduits et libère du temps au médecin.
Le décret précise que, dans le cas où le patient n’a pas eu de diagnostic médical préalable, le nombre de séances est limité à huit par patient. Cela suggère que les pathologies traitées en accès direct devraient être des conditions pour lesquelles une évaluation et une intervention kinésithérapique initiale peuvent apporter des bénéfices notables en un nombre limité de séances.

Si au cours de la prise en charge, le kinésithérapeute estime qu’un diagnostic ou un avis médical est nécessaire, il doit orienter le patient vers son médecin traitant ou un autre médecin. Cela implique que si une pathologie semble plus complexe ou grave que prévu, le kinésithérapeute doit interrompre l’accès direct et renvoyer le patient vers un médecin.

Bien que le décret ne liste pas les pathologies spécifiques, les exemples courants de rééducation fonctionnelle (entorses, fractures mineures, tendinites, etc.) sont probablement incluses dans les cas typiques où l’accès direct pourrait être approprié. Ce sont des conditions fréquemment rencontrées en kinésithérapie, où une intervention précoce peut souvent prévenir l’aggravation des symptômes.

 

Modalités de l’expérimentation

Ce décret prévoit que les patients pourront consulter directement un masseur-kinésithérapeute sans ordonnance préalable dans la limite de huit séances par patient. Cette expérimentation est lancée dans 16 départements, dont 3 ultramarins.

Les kinésithérapeutes participants doivent être inscrits dans une CPTS et déclarer leur participation à l’expérimentation auprès de leur Agence Régionale de Santé (ARS) via une application dédiée. La liste des professionnels autorisés sera publiée sur le site de l’ARS, et ces informations seront partagées avec les organismes de sécurité sociale locaux (CPAM et MSA).

 

Départements concernés et justifications

Les 16 départements choisis pour cette expérimentation sont : l’Ain, l’Ariège, les Bouches-du-Rhône, la Charente, la Corrèze, le Doubs, la Haute-Garonne, l’Hérault, l’Isère, le Nord, le Bas-Rhin, le Rhône, la Savoie, la Vendée, ainsi que les départements d’outre-mer de la Martinique, la Guadeloupe et la Réunion.
Selon quels critères le choix s’est-il opéré ?
D’une part, la diversité géographique et démographique : elle permet de regrouper un échantillon représentatif de la population française. L’expérimentation s’effectue dans des contextes variés et permet de mesurer son efficacité de manière globale.
D’autre part, le niveau de besoins en soins de santé : certains départements, notamment les Bouches-du-Rhône, la Haute-Garonne et le Nord, sont connus pour leurs besoins élevés en matière de soins de santé en raison de leur densité de population et de la prévalence de certaines pathologies nécessitant une intervention kinésithérapique.
Enfin, le caractère limité de l’accés aux soins : les départements d’outre-mer, ainsi que certains départements ruraux comme l’Ariège et la Corrèze, ont été choisis en raison de leur accès restreint aux soins.

 

Suivi et évaluation

Chaque ARS est chargée de l’évaluation de l’expérimentation dans son territoire. Un état des lieux de la prise en charge en masso-kinésithérapie sera effectué avant le début de l’expérimentation, et des rapports annuels détaillant la qualité de la prise en charge, le nombre de séances, les motifs de consultation, et les éventuels événements indésirables seront centralisés.
Les résultats de cette évaluation permettront de mesurer l’impact de l’accès direct sur le système de santé et d’ajuster le dispositif si nécessaire.

 

Réactions et perspectives

Le premier syndicat des kinésithérapeutes, la FFMKR, via un communiqué de presse a salué la publication du décret, considérant que l’accès direct est une évolution logique et bénéfique pour la profession et les patients. Toutefois, ils regrettent que cette avancée soit limitée à une expérimentation transitoire, exprimant le souhait de voir cette pratique généralisée à l’avenir.

Finalement, cette expérimentation représente une avancée significative dans l’amélioration de l’accès aux soins en France. En permettant aux kinésithérapeutes de recevoir directement les patients, elle vise à désengorger les cabinets médicaux et à offrir une prise en charge plus rapide et efficace des pathologies nécessitant une rééducation. Les résultats de cette expérimentation seront déterminants pour l’avenir de la pratique kinésithérapique en France.