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Assises de la pédiatrie et plan de lutte contre les violences faites aux enfants

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Le 23 avril 2024, Christèle Gras Le Guen, porte-parole de la Société française de pédiatrie et Adrien Taquet, secrétaire d’État en charge de l’Enfance et des Familles auprès du ministre des Solidarités et de la Santé, ont remis leur rapport « Investir dans la santé de l’enfant : une urgence nationale » à Frédéric Valletoux, ministre délégué chargé de la Santé et de la Prévention. Cette initiative s’inscrit dans les Assises de la pédiatrie et de la santé de l’enfant, lancées fin 2022, visant à répondre aux préoccupations des professionnels de santé et à améliorer la prise en charge globale des enfants. L’annonce de la feuille de route 2024-2030 a été faite le 24 mai 2024 lors des conclusions des Assises de la pédiatrie et de la santé de l’enfant. En voici les grandes priorités et moyens d’action.

Assises de la pédiatrie et de la santé de l’enfant : des mesures concrètes pour l’avenir

Les priorités pour une meilleure santé de l’enfant

Les travaux ont été organisés autour de six axes principaux, chacun avec des objectifs spécifiques :

1. Garantir à tous les enfants un parcours de santé de qualité et sans rupture

Amélioration du suivi des enfants en bonne santé et prise en charge des maladies aiguës : La précocité des interventions et un suivi régulier de l’enfant par le pédiatre garantissent un meilleur développement de l’enfant et sont de nature à rassurer les parents souvent inquiets pour leur progéniture. Une infection respiratoire courante peut ainsi éviter de tourner à une détresse plus aigüe.

La sécurisation des conditions de naissance est essentielle pour prévenir les risques d’apparition de futures pathologies. Par exemple, la présence d’équipes médicales spécialisées en néonatologie dans les maternités garantit que les nouveau-nés prématurés ou subissant des complications à la naissance reçoivent immédiatement les soins nécessaires. Des initiatives telles que la promotion de l’accouchement dans des environnements contrôlés et sûrs, avec un accès immédiat à des soins intensifs néonatals si nécessaire, jouent un rôle crucial pour réduire les risques associés aux naissances compliquées.

Promouvoir la santé dans tous les lieux de vie des enfants . Les écoles, les crèches et les terrains de jeu, sont des environnements idéaux pour instaurer des habitudes de vie saines dès le plus jeune âge. Au sein du milieu scolaire, des activités physiques régulières, des repas équilibrés et une éducation à la santé permettent aux enfants de comprendre et de prendre goût à l’importance d’une bonne alimentation et d’un mode de vie actif en l’expérimentant en vie réelle.

 

2. Améliorer le parcours en santé des enfants aux besoins particuliers

L’organisation de la prise en charge des enfants atteints de maladies chroniques nécessite une coordination étroite entre les différents acteurs de la santé pour assurer un suivi continu et adapté. C’est le cas de l’enfant diabétique. Il doit bénéficier d’un suivi régulier par un endocrinologue, d’un soutien nutritionnel et de l’éducation de ses parents et enseignants pour gérer sa condition au quotidien. La mise en place de réseaux de soins spécialisés permet de centraliser les ressources et de fournir un soutien complet et intégré aux familles.

Garantir l’accès aux soins pour les enfants ayant des besoins spécifiques , tels que les enfants en situation de handicap, demeure une priorité. Les centres de soins multidisciplinaires peuvent offrir des services adaptés incluant des kinésithérapeutes, des orthophonistes et des psychologues, permettant ainsi une prise en charge globale. L’accessibilité physique des établissements de santé et la formation des professionnels pour répondre aux besoins particuliers de ces enfants sont également cruciales pour assurer des soins de qualité.

La lutte contre la précarité en santé vise à réduire les inégalités d’accès aux soins en fonction des conditions socio-économiques. Il existe des programmes de dépistage gratuits et des consultations médicales à tarif réduit peuvent être mis en place dans les quartiers défavorisés pour s’assurer que tous les enfants reçoivent les soins nécessaires, indépendamment des revenus de leurs parents. De plus, des initiatives comme la distribution de kits de santé (comprenant des produits de première nécessité comme des médicaments de base, des vitamines et des produits d’hygiène) peuvent contribuer à améliorer la santé des enfants vivant dans des conditions précaires.


3. Relever le défi de la santé mentale des enfants

La prévention des besoins en soins de santé mentale et la prise en charge adaptée en pédopsychiatrie sont essentielles pour répondre aux troubles psychiques chez les enfants et les adolescents. Encore une fois, c’est à l’école que l’on peut tenter de repérer et d’orienter les enfants souffrant de troubles anxieux ou dépressifs. Les centres médico-psychologiques pour enfants et adolescents jouent un rôle crucial en offrant des services de soutien psychologique, de thérapie comportementale et de conseils familiaux, assurant ainsi un soutien continu et spécialisé.


4. Mieux prévenir pour améliorer la santé globale des enfants

Impliquer les enfants et les parents dans la gestion de leur santé . Il n’est pas évident ou purement intuitif pour des parents d’adopter les bons réflexes de santé pour leurs enfants. Une aide peut leur être proposée au travers d’ateliers éducatifs concernant la nutrition, l’activité physique organisés par exemple par les PMI. Il en va de même concernant la prévention des risques majeurs pour la santé des enfants, comme les accidents domestiques.


5. Renforcer la formation professionnelle et faire évoluer les métiers de la santé de l’enfant

La formation continue tout au long de la carrière est indispensable pour maintenir le niveau de compétences et intégrer les recommandations les plus récentes en pédiatrie.


6. Améliorer les connaissances et les pratiques en santé de l’enfant par la recherche et l’innovation


La mise en place de cohortes de recherche pédiatriques permet d’étudier les facteurs influençant la santé des enfants sur le long terme, tandis que le développement de nouvelles technologies médicales, comme les applications de suivi de la santé infantile, facilite la gestion des soins. Les instituts hospitalo-universitaires dédiés à la pédiatrie jouent un rôle clé en intégrant la recherche de pointe avec la pratique clinique, assurant ainsi que les découvertes scientifiques se traduisent rapidement en améliorations concrètes des soins de santé pour les enfants.


Les moyens d’agir pour une pédiatrie moderne au service de l’enfance


Pour chaque axe de travail du rapport, des moyens d’action ont été définis dont l’objectif est de créer un système de santé pédiatrique résilient, capable de répondre aux défis actuels et futurs, tout en plaçant le bien-être des enfants au centre des préoccupations :


1. Renforcement des services de PMI (Protection maternelle et infantile)

Les Assises de la Pédiatrie et de la Santé de l’Enfant ont été l’occasion de réaffirmer le rôle essentiel des PMI et leurs moyens ont été augmentés en conséquence.
Un cadre national pour les PMI sera établi, fixant des objectifs clairs de santé publique, tels que l’augmentation des taux de vaccination et le dépistage précoce des troubles de développement.
De plus, la valorisation des missions de santé publique passera par une contractualisation renforcée avec les collectivités locales, assurant ainsi une meilleure coordination des efforts et une plus grande efficacité des interventions sur le terrain.


2. Améliorer l’accès aux soins non-programmés

Quand consulter le pédiatre, quand favoriser la téléconsultation ou se rendre aux urgences… toutes ces préoccupations feront l’objet d’une campagne de communication nationale dans le but sensibiliser les familles sur le bon usage du système de santé.
En outre, le déploiement de filières pédiatriques spécifiques au sein des Services d’Accès aux Soins (SAS) permettra de traiter plus rapidement les cas non urgents mais nécessitant une attention médicale. Le désengorgement des urgences est une nécessité absolue, en particulier dans les mégalopoles où elles sont très encombrées comme de Marseille.


3. Prise en charge des enfants victimes de violence

La protection des enfants victimes de violence est une priorité absolue. À cet effet, la généralisation des Unités d’Accueil Pédiatrique Enfants en Danger (UAPED) est prévue pour offrir un espace sécurisé où les enfants peuvent recevoir des soins médicaux et psychologiques adaptés. La mise en place le 6 novembre 2023, d’une UAPED au sein de l’hôpital Femme Mère Enfant des HCL (hospices civils de Lyon) a permis d’assurer la prise en charge des enfants victimes de violence domestique ou d’abus sexuels dans un environnement conçu pour minimiser le traumatisme supplémentaire. Cette action est le fruit d’un partenariat entre l’Autorité judiciaire, l’Agence régionale de santé (ARS), la Métropole de Lyon et les Hospices Civils de Lyon.

En parallèle, le renforcement des Équipes Pluridisciplinaires Régionales de l’Enfance en Danger (EPRED) assurera une coordination efficace entre les différents acteurs, tels que les médecins, les travailleurs sociaux et les forces de l’ordre. Ces équipes travailleront ensemble pour évaluer les risques et mettre en place des plans de protection adaptés à chaque situation.

De plus, le développement de filières spécifiques pour les enfants dans les Centres régionaux de psycho-traumatisme (CRP) offrira des soins spécialisés pour aider les jeunes victimes à surmonter leurs expériences traumatiques. Par exemple, des thérapeutes formés aux techniques de jeu thérapeutique et de thérapie cognitivo-comportementale pourront offrir un soutien indispensable pour aider les enfants à retrouver un sentiment de sécurité et de normalité.

 

Étapes et calendrier de la feuille de route 2024-2030

Ces mesures s’inscrivent dans la feuille de route 2024-2030 visant à renforcer l’offre hospitalière. Elles visent à renforcer l’offre hospitalière et à garantir que tous les enfants, quels que soient leur lieu de vie ou leurs besoins spécifiques, puissent accéder à des soins de qualité, adaptés et continus.

2025 :

  • Début de l’intégration des filières pédiatriques dans les services d’accès aux soins (SAS).
  • Création de 100 places supplémentaires pour la formation des orthophonistes.

2026

  • Déploiement complet des filières pédiatriques dans les services d’accès aux soins (SAS).
  • Développement des compétences en pratique avancée en santé de l’enfant pour les infirmiers puériculteurs : cette mention spécifique en pratique avancée leur permettra une spécialisation en santé de l’enfant.

2027 :

  • Objectif de prise en charge de 10 000 enfants de moins de 3 ans et 4 000 enfants âgés de 4 à 17 ans en HAD (Hospitalisation à Domicile).
  • Intégration effective des compétences en pratique avancée pour les infirmiers puériculteurs.

2030 :

  • Cible de 600 places de formation à la pédiatrie.
  • Augmentation de 4% des capacités en soins critiques en réanimation néonatale.

 

 

Réactions et perspectives sur la pédiatrie et la santé de l’enfant en France :

La publication de ce rapport et la présentation de la feuille de route ont suscité diverses réactions.
D’un côté, les professionnels de santé saluent l’initiative comme un tournant majeur pour la santé des enfants en France. Ils soulignent l’importance de l’augmentation des ressources et de l’amélioration de l’organisation des soins pour répondre aux besoins grandissants. À cet égard, la Société Française de Pédiatrie a exprimé un soutien fort à la feuille de route, en insistant sur la nécessité de renforcer les services de pédiatrie pour garantir un suivi continu et de qualité pour tous les enfants.

De l’autre, certaines critiques émergent, mettant en lumière les retards accumulés et l’absence de budget consolidé. Des organisations comme l’Unafam (Union Nationale de Familles et Amis de Personnes Malades et/ou Handicapées Psychiques) ont exprimé des inquiétudes concernant la faisabilité des mesures annoncées. Elles soulignent que la crise sanitaire a exacerbé les besoins en soins tout en aggravant la pénurie de soignants, laissant les familles souvent désemparées face à la situation.

Les Assises de la pédiatrie et de la santé de l’enfant représentent une opportunité de transformation et d’amélioration des prises en charge, avec un focus central sur la mise en avant des besoins des enfants et l’engagement de tous les acteurs de la santé. La feuille de route 2024-2030 définie autour de la prévention, de l’amélioration de la prise en charge sanitaire, de la santé mentale, et du développement de la recherche et de l’innovation, est attendue pour apporter des réponses concrètes aux défis actuels.

 

Plan de lutte contre les violences faites aux enfants

Dans cette continuité, le « Plan de lutte contre les violences faites aux enfants 2023-2027 » s’inscrit comme une réponse concrète et complémentaire aux préoccupations soulevées lors des Assises de la pédiatrie. Ce plan ambitieux vise à protéger les enfants contre toutes formes de violence, qu’elles soient physiques, sexuelles, psychologiques ou numériques, en mettant en place des mesures préventives et réactives. Il s’agit d’une démarche globale et coordonnée qui s’aligne parfaitement avec les recommandations et les constats des Assises, soulignant l’importance d’une approche intégrée pour assurer la sécurité et le bien-être des enfants.

Objectifs Clés

Parmi les objectifs principaux du plan, on trouve la protection renforcée des enfants contre toutes formes de violence. Ce plan cherche à prévenir la survenue et la répétition des actes de violence en mettant en place des mesures préventives robustes. Il vise également à améliorer la prise en charge des enfants victimes, en fournissant des services adaptés et en augmentant le soutien aux victimes et à leurs familles. Un autre objectif crucial est de soutenir les parents, de sensibiliser et de mobiliser la société civile afin de créer un environnement protecteur pour les enfants. Pour cela, le plan prévoit des campagnes de sensibilisation et des initiatives éducatives visant à prévenir les violences sexuelles et autres formes de maltraitance. En outre, il s’agit d’outiller et de soutenir les professionnels travaillant avec des enfants, afin qu’ils soient mieux préparés à repérer et à gérer les situations de violence. Enfin, le développement des données et des connaissances est essentiel pour améliorer la prévention des violences et la protection des enfants, permettant une réponse plus informée et efficace aux problématiques de maltraitance.

Le plan de lutte contre les violences faites aux enfants comprend plusieurs mesures importantes. Une des premières initiatives a été la création d’un Bureau des Mineurs en 2023, dédié à la coordination de la lutte contre les violences envers les mineurs et à la conduite d’enquêtes criminelles spécifiques à ce domaine. Ce bureau a pour mission de centraliser les efforts et d’assurer une réponse rapide et cohérente aux situations de violence. Par ailleurs, le soutien aux victimes a été renforcé par une augmentation significative du financement des services recueillant les témoignages des enfants et du soutien apporté aux familles en situation précaire, en particulier celles hébergées dans des hôtels. Cela permet de garantir que les enfants victimes reçoivent l’aide nécessaire pour se reconstruire et surmonter les traumatismes subis.

Principales mesures

Le plan inclut également un renforcement des ressources humaines pour mener davantage d’inspections dans les établissements sociaux et médico-sociaux accueillant des enfants vulnérables. Ces inspections sont essentielles pour s’assurer que les enfants sont bien traités et pour identifier rapidement toute forme de maltraitance ou de négligence. En complément, un système de vérification automatisée des casiers judiciaires des professionnels et bénévoles travaillant avec des enfants a été mis en place pour assurer la sécurité des enfants et prévenir toute forme de récidive par des personnes ayant déjà été condamnées pour des actes de violence.

En matière de sensibilisation et d’éducation, des campagnes nationales ont été lancées, y compris la première communication gouvernementale utilisant le terme « inceste », afin de briser les tabous et de sensibiliser le public aux réalités de la violence sexuelle. Des initiatives éducatives ont également été déployées dans les écoles et autres environnements centrés sur les enfants pour prévenir les violences sexuelles et autres formes de maltraitance dès le plus jeune âge. Pour soutenir ces efforts, un fonds d’innovation de 2 millions d’euros a été créé en 2024 pour appuyer les initiatives associatives contre la violence envers les enfants. Ce fonds vise à encourager les solutions novatrices et efficaces pour lutter contre la maltraitance.

Avancées réalisées en 2023

En 2023, des avancées significatives ont été réalisées, notamment à travers divers colloques et ateliers réunissant des professionnels et des associations pour aborder les violences dans le sport, la recherche sur les abus intrafamiliaux, et la stratégie globale contre les violences faites aux enfants. Ces événements ont permis de partager des connaissances, de discuter des meilleures pratiques et de renforcer la collaboration entre différents acteurs impliqués dans la protection des enfants. De plus, des actions législatives ont été introduites, avec la première lecture de lois visant à sécuriser l’espace numérique, incluant des protections spécifiques pour les enfants, afin de les protéger des dangers en ligne.
Enfin, des campagnes de sensibilisation ont été lancées pour lutter contre les violences sexuelles et pour introduire des mesures de prévention contre le harcèlement scolaire. Ces campagnes visent à sensibiliser le public, à éduquer les enfants et les adolescents sur leurs droits et sur les moyens de se protéger, et à encourager la dénonciation des actes de violence.

Ce plan représente une approche multi-facettes impliquant la prévention, la protection, le soutien et des améliorations systémiques pour protéger les enfants de toutes formes de violence dans tous les contextes. Il s’agit d’une mobilisation complète de la société, incluant les enfants, les parents, les professionnels et les citoyens, pour créer un environnement où les enfants peuvent grandir en sécurité et avec dignité.

Les efforts conjoints des Assises de la pédiatrie et du Plan de lutte contre les violences faites aux enfants témoignent de l’engagement déterminé de la société française à créer un environnement sûr et bienveillant pour tous les enfants, permettant leur épanouissement et leur protection contre toute forme de maltraitance.

 

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Sources :

Assises de la pédiatrie et de la santé de l’enfant – Ministère du travail, de la santé et des solidarités (sante.gouv.fr)

Remise du rapport sur la santé de l’enfant – Ministère du travail, de la santé et des solidarités (sante.gouv.fr)

Assises de la pédiatrie et de la santé de l’enfant – Ministère du travail, de la santé et des solidarités (sante.gouv.fr)

Assises de la santé de l’Enfant | Société Française de Pédiatrie (sfpediatrie.com)

Assises de la pédiatrie et de la santé de l’enfant | Unafam

Une unité d’accueil pédiatrique enfants en danger (UAPED) inaugurée à l’hôpital Femme Mère Enfant | Agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes (sante.fr)

Plan de lutte contre les violences faites aux enfants 2023-2027 | solidarites.gouv.fr | Ministère du Travail, de la Santé et des Solidarités

Lutter contre les violences faites aux enfants | solidarites.gouv.fr | Ministère du Travail, de la Santé et des Solidarités