Au cœur de l’Internat de Marseille : interview de Dorian Bigey-Frau, président des Internes en médecine
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Au cœur de l’Internat de Marseille, le président du syndicat Dorian Bigey-Frau, interne en pédiatrie, nous livre dans cette interview un aperçu de son parcours, de ses motivations et de ses ambitions pour la communauté des internes en médecine. Son engagement associatif, débuté dès la première année de PACES, illustre sa volonté d’améliorer le quotidien et l’avenir de ses pairs.
Qui êtes-vous ? Quel a été votre parcours jusqu’à la présidence de l’internat ?
« Bonjour, je suis Dorian Bigey-Frau, actuellement interne en pédiatrie en septième semestre, et je poursuis en parallèle un master deux dans le cadre de mon année de recherche. Mon parcours universitaire a débuté à Clermont-Ferrand, bien que je sois originaire de Toulouse, que je considère comme la plus belle ville du monde. La suite de mon parcours m’a mené à Marseille, suite au classement national post-études, où je me suis investi dans la vie associative et syndicale, avant de prendre la présidence du syndicat des internes. »
Comment avez-vous commencé votre engagement associatif et pour quelles raisons ?
« Mon engagement associatif a démarré dès ma première année d’études en médecine , la PACES. J’ai participé à diverses activités, notamment au sein du pôle humanitaire de ma fac, où nous organisions des collectes pour le Téléthon. L’organisation du Critérium d’hiver 2016 a été un tournant, occupant une grande partie de mon année et m’apprenant à gérer un événement d’ampleur.
Cette envie d’engagement était initialement festive pour organiser des soirées. Ensuite cela a été plus sérieux pour aider mes co-internes dans leurs choix. J’ai voulu apporter ma pierre à l’édifice, d’abord au travers de l’association des internes de pédiatrie, puis au travers du syndicat des internes que j’ai rejoint dès 2020.
J’ai succédé fin 2023, naturellement à mon prédécesseur Antoine Tichadou après l’avoir accompagné durant quatre ans, dont deux en tant que secrétaire général. Je connaissais déjà tout le monde : les instances facultaires et hospitalières. »
Quel est le quotidien d’un président d’internat ? Quels sont les défis et les satisfactions ?
« Le quotidien est partagé entre les tâches administratives, les réunions diverses avec les partenaires et les instances universitaires ou hospitalières, et bien sûr, le soutien direct aux internes. Je siège à la commission médicale d’établissement, à la commission d’organisation des soins et à celle de la qualité de vie au travail. J’organise une réunion de bureau par mois.
J’ai surtout un rôle de représentation auprès des instances qui ne veulent, souvent traiter qu‘avec le président. Je me fais donc le relais auprès des membres du bureau, ce que je trouve dommage car j’aimerai pouvoir échanger avec eux en amont et leur déléguer davantage de missions.
Nous sommes également en lien avec l’ISNI qui est notre intersyndicale nationale des internes. Nous travaillons notamment avec eux sur une action juridique contre l’AP-HM pour le non-respect du temps de travail.
Je garde un rôle assez important dans les choix puisque je l’ai géré ces sept derniers semestres. J’essaye de passer le relais aux plus jeunes. Notre équipe est bien rôdée.
Ces activités nécessitent une grande disponibilité et une capacité à jongler entre différents sujets, parfois dans l’urgence. Bout à bout, cela représente entre deux à trois heures par jour. »
Quel est votre impact espéré sur la communauté des 2 000 internes en médecine que vous accompagnez ?
« Mon objectif principal est d’apporter un soutien effectif aux internes en médecine, que ce soit pour des questions pratiques, des difficultés dans leur parcours ou pour améliorer leur qualité de vie au travail. Heureusement, j’ai le soutien de Magali, directrice administrative, à qui je délègue les sujets qu’elle peut traiter en direct.
Moi je gère les situations un peu plus complexes, j’aide à lever des doutes ou échange avec les chefs de service quand un interne m’évoque un mal être durant son stage. Je peux aussi assumer le rôle de médiateur en cas de conflits entre internes. J’ai souvent des questions sur les inter CHU par exemple. Donc ce sont vraiment des sollicitations très diverses et variées. J’ai essentiellement un rôle de conseil, de guide comme un grand frère. »
Comment se passe la collaboration avec les instances professionnelles et hospitalières ?
« La collaboration avec les instances professionnelles et hospitalières est fondamentale. Elle se base sur une représentation fidèle et active des intérêts des internes. Nous travaillons à établir un dialogue constructif avec ces instances pour faire remonter les problématiques rencontrées par les internes et chercher ensemble des solutions. Nous entretenons par exemple d’excellentes relations avec la direction des affaires médicales ce qui nous permet de bien travailler avec l’AP-HM.
Nous n’avons aucun tabou à faire remonter les problématiques évoquées par chacun. La direction des affaires est très réactive à ce sujet. Nous avons un rôle de défense. Je pense notamment à un exemple marquant où un chef de service avait mis en place une ligne d’astreintes de façon officieuse. Il a fallu réclamer la rémunération des internes en commission d’organisation des soins. [voir notre article : « Revalorisation des gardes et astreintes des internes« ]
Nous faisons aussi le pont entre les choix d’internes et les disponibilités dans les établissements. Il est essentiel de maintenir une relation de confiance et de respect mutuel pour soutenir les internes dans leurs choix de vie. »
Quels sont les moments marquants de votre présidence : le meilleur et le pire ?
« Parmi les moments les plus marquants, je retiens particulièrement l’organisation de la dernière grosse soirée que le SAIHM a géré. Elle a rassemblé plus de 550 participants, reflétant notre volonté de créer du lien et du bien-être au sein de notre communauté.
En fait marquant négatif, je pense au suicide d’une co-interne de psychiatrie en octobre dernier. C’est un événement tragique qui nous tous a profondément marqués. Malgré tous nos efforts et ceux du réseau de psychologues et psychiatres de l’AP-HM, cette perte a été un rappel douloureux des défis auxquels nous sommes confrontés en matière de santé mentale et du soutien nécessaire à apporter à nos collègues en difficulté. »
En quoi les partenariats sont-ils cruciaux pour le syndicat ?
« Les partenaires, tel que GPM, jouent un rôle capital dans le fonctionnement et les initiatives du syndicat. Ils nous permettent d’offrir des avantages tangibles à nos adhérents, tels que des réductions, des services adaptés à leurs besoins, ou encore des opportunités de formation et de loisirs enrichissants. Nous avons pu bénéficier de remises sur les permis bateaux, de cours de sport, des photo Booth en soirée.
Par ailleurs, le soutien financier et matériel de nos partenaires est essentiel pour mener à bien nos projets et événements. Nous apprécions tout particulièrement notre partenariat avec GPM que nous ne lâcherions pour rien au monde. Vous êtes une équipe très proactive, ça avance, c’est concret.
Il arrive néanmoins que certains partenariats se passent mal, que nos internes ne perçoivent pas de valeurs ajoutées et cela peut nous faire perdre en crédibilité. Il est donc important de choisir ces partenariats avec discernement, afin d’assurer leur alignement avec les valeurs et les intérêts de nos membres, et d’éviter tout impact négatif sur la perception du syndicat. »
Quels conseils donneriez-vous aux futurs présidents d’internat ?
« Pour les copains président, je leur dirai de ne pas hésiter à faire appel au réseau et à poser des questions à leurs confrères présidents, à solliciter de plus gros syndicats.
Il est crucial de rester constamment à l’écoute des besoins de leurs membres et de maintenir une communication ouverte et transparente.
Il est également important de s’appuyer sur une équipe solide et engagée, et de ne pas hésiter à déléguer pour mieux gérer la charge de travail.
Développer des partenariats stratégiques et diversifiés est essentiel, mais toujours avec un œil critique pour s’assurer qu’ils apportent une réelle valeur ajoutée aux membres. »
En clôturant cette interview, Dorian Bigey-Frau nous laisse entrevoir les multiples facettes de son rôle de président des internes à Marseille. À travers les défis et les réalisations, son parcours est un témoignage de l’engagement profond et de la persévérance nécessaires pour améliorer le quotidien et l’avenir des internes en médecine. Sa vision et ses conseils résonnent comme un appel à l’action pour les futurs leaders associatifs, soulignant l’importance cruciale de l’engagement, de la solidarité, et du soutien mutuel dans le domaine de la santé.